Œuvre militante d'un luthérien orthodoxe, l'Histoire du Dr. Faust condamne, à la suite du grand réformateur et des prédicateurs protestants, les festivités carnavalesques qui favorisent l'oisiveté et la débauche et participent de la civitas diaboli. En jetant l'anathème sur une pratique légitimée par l'Eglise romaine, l'auteur dépasse la seule visée de " décarnavalisation " (J. Lefebvre), de social discipline et d'ascèse morale. Il relate la double perversion du carnaval - génitif objectif et subjectif à la fois -, pervers par essence et perverti par Faust et sa bande de noceurs. La contribution élucide les diverses allusions aux coutumes carnavalesques du XVIe siècle germanique que recèle une série d'épisodes de l'Historia. Le récit rend compte de la bombance des jours gras et de rituels probablement inspirés de l'exemple nurembergeois, pris à partie par Luther lui-même, tels que les momeries et les courses estudiantines en traîneau. Au-delà des simulacres et des renversements topiques (haut-bas, humain-animal), il en est de diaboliques, comme le masque d'âne qui se fait chair, la farandole simiesque ou l'inversion du calendrier liturgique, la négation du temps de carême avec les agapes blasphématoires et cannibales et la pérennisation sacrilège de la licence provisoire jusqu'à l'octave de Pâques.